J’sais vraiment pas quoi t’dire ; ça pourrait pas être pire
Elle est partie, mon vieux
Elle est partie, qu’est-ce que tu veux
Elle t’allait comme un gant, et te v’là comme un gland
Dans ton eau d’rose croupie, morose comme pas permis
On va t’saouler, tu viens ; écluser ton chagrin
J’te prêterai mon épaule
Quand tu chialeras pire qu’un saule
Faut pas que tu prennes racine, terré dans la déprime
Tout ça pour une belle plante un peu trop exigeante
Qui te laisse planté là, et arbore à son bras
Son nouveau, son dernier
Qui, pour sûr, n’est qu’un fumier
J’sais vraiment pas quoi t’dire ; ça pourrait pas être pire
Elle est partie, mon vieux
Elle est partie, qu’est-ce que t’y peux
Elle avait une gueule d’ange, mais là c’est toi qui manges
Alors reprends un verre, pour noyer ta misère
L’alcool n’a pas d’égal ; bois, c’est moi qui régale
Tu l’oublieras, mon frère
Quand ce soir sera devenu hier
Une fois ta coupe pleine, t’évacueras ta peine
Perché sur le trottoir, tu seras pas beau à voir
Et le cœur plein de bile, tu pleureras l’volatile
L’oiseau qui a filé
Le parfait amour qui s’est envolé
Je n’savais pas quoi t’dire ; ça a fini par venir
Tu n’pensais qu’à t’détruire, fallait pallier le pire
Elle est partie, mon vieux
Allez, dégueule, ça ira mieux
Ils sont tous là, dehors, à grouiller dans la rue
Ils sont tous là, encore, imposés à sa vue
Armé de sa verve, Alfred observe
Non sans réserve, Alfred observe
Depuis sa dernière fugue on l’a cloîtré chez lui
Le pauvre ne subjugue plus personne de la famille
Il ne lui reste donc pour seule occupation
Que de toiser les quelconques par la fenêtre du salon
Alfred se dit plein de choses, en regardant les passants
Prendre d’étranges poses, ou ne faire que passer
« Faudrait que je les dégomme », grogne-t-il en grimaçant
Car du cirque des hommes, Alfred en a assez
Alfred observe, s’énerve
Ça recommence à monter
Alfred a l’air sévère
Sur le point d’exploser
Un coup d’œil de plus, et Alfred fulmine
Le coup d’œil de trop, sa colère culmine
Avec la rage en sus, ce sera détonant
« Cette fois c’est pour bientôt », pense Alfred, menaçant
« À croire qu’ils font exprès, juste pour m’agacer
De prendre cet air niais, de toujours jacasser
Si ça ne tenait qu’à moi, et à ma rancœur féconde
On ne les laisserait pas vivre encore une seconde
Donnez-m’en les moyens et je rase tout de go
Et dans la mort, au moins, vous serez tous égaux
Car vos histoires de classe, d’argent et de couleur
Vous condamnent, de guerre lasse, à subir ma fureur »
Alfred observe, s’énerve
Il est bien remonté
Alfred a l’air sévère
Il n’y aura pas de quartier
Mais Alfred est un chat, qui plus est d’appartement
Et comme ce n’est pas aujourd’hui, apparemment
Qu’il pourra en finir avec ceux du dehors
Alfred soupire, s’étire, se roule en boule et s’endort
Alfred observe, s’énerve
Mais retourne se coucher
Car avoir l’air sévère
Ça n’a fait que l’épuiser
Alfred observe, s’énerve
Mais retourne se coucher
Car au moins dans ses rêves
Les bipèdes vont morfler
Avec ta face de mongol
T’agences les têtes de gondoles
T’attires les chalands à la pelle
Avec autant de prix d’appels
Tu te prends pour un marchand de bien
Tu dis juste rendre service
Aux clients qui se serrent la vis
Et poussent leur caddie déjà plein
C’est super
Auchan, Cora, Les Mousquetaires
Surfaces de multiples hectares
Pour pouvoir exercer ton art
Mettre à profit ton savoir-faire
Rentrer dans la tête du blaireau
Qui déambule dans les rayons
Faire un parterre de promotions
Pour guider les pas du prolo
C’est super
Après tout c’est toi qui décides
Où il regarde l’œil avide
L’emplacement des produits stars
Qu’il voit à la télé le soir
Il faudra qu’il courbe l’échine
S’il veut atteindre les premiers prix
Quelques centimes d’économie
Grâce à la nourriture d’usine
C’est super Marchand
Héros du supermarché
Pas besoin d’cape
Quand on sort de HEC
Avec ta tête de jeune premier
T’es le roi de l’hypermarché
Tu formalises et puis tu gères
Le panier de la ménagère
Quand elle prépare le repas d’midi
Roue d’la Fortune et Juste Prix
Entre les deux les annonceurs
Poursuivent leur travail de sapeurs
C’est super
C’est sans doute pour cela qu’elle cède
Quand le gamin braille et réclame
Le Crispi-choco qui l’obsède
L’asservissement au fond de l’âme
Elle ne réfléchit plus vraiment
Prend les articles machinalement
Suivant l’ordre que t’as établi
Les codes-couleurs sur les produits
C’est super
Vu qu’il faut bien nourrir les gosses
Quitte à alimenter l’négoce
Et même si tu t’en frottes les mains
Elle reviendra samedi prochain
Si c’est dur à la fin du mois
Elle pourra payer en trois fois
Majoré de quelques pourcents
Le caddie restera alléchant
C’est super Marchand
Héros du supermarché
Pas besoin d’cape
Quand on sort de HEC
Avec ta gueule de sans-cœur
D’égoïste et de beau-parleur
Tes talents de fin psychologue
Tu m’inspires ce monologue
C’est super Marchand
Héros du supermarché
Pas besoin d’cape
Quand on sort de HEC
Pas d’costume moulant
Mais un costard bien taillé
C’est ça qu’il faut quand
On défend les intérêts financiers
Un dimanche midi, la famille réunie
Pour fêter, sans envie, l’anniversaire de mamie
Ça faisait depuis noël que je ne les avais pas vus
Et c’est toujours pareil, comme si c’était convenu
Chacun se vautre à son tour dans le bain de l’hypocrisie
Mais malgré les atours, y’a des relents de moisi
Y’a ceux qui cabotinent, les rancunes intestines
Et les sempiternelles jalousies fraternelles
Je m’ennuie, comme prévu, mais je prends patience
Car le moment venu, l’un étalera sa science
Un autre rétorquera, emporté par l’alcool
Et tout dérapera, les actes et les paroles
Pentes savonneuses et sol glissant
Pour un dérapage imminent
J’attends le moment si spécial / génial
De l’Aquaplaning familial
Une fois n’est pas coutume, je préfèrerais être ailleurs
Qu’entre ceux en costume et celles en tailleur
Bien que ce ne soit pas mon fort de chercher à m’adapter
J’ai fait quelques efforts, drapé de bonne volonté
Moi, laissant au vestiaire l’attitude insoumise
Pour rentrer dans le bestiaire, j’ai même mis une chemise
Je fais semblant d’avoir l’air, je feins d’être concerné
Quand l’un d’eux déblatère, même si je suis consterné
Et je ronge mon frein, et j’attends sans rien dire
Quand mon idiot de cousin dit comme son père en pire
Pentes savonneuses et sol glissant
Pour un dérapage imminent
J’attends le moment si spécial / génial
De l’Aquaplaning familial
Les estomacs sont pleins, et les verres trop vides
Le repas touche à sa fin, plus grand monde de lucide
Moi je reste sur ma faim, car même si beaucoup s’engueulent
Personne n’est assez plein pour se foutre sur la gueule
Je sors de ma torpeur quand on me prend à parti
Mais je ne ferais pas l’erreur de faire part de mon avis
Cousine profite du blanc, prend une posture ad hoc
Et, du haut de ses seize ans, annonce qu’elle est en cloque
Et qu’elle a décidé, puisqu’elle est amoureuse
De tout plaquer, de le garder, quitte à finir pondeuse
La morveuse a mis les pieds dedans
Sans se soucier de chausser des gants
Et sur fond de Mamie qui chiale
Direction le planning familial
Pentes savonneuses et sol glissant
Le dérapage c’est maintenant
Et sur fond de Mamie qui chiale
C’est l’Aquaplaning familial
Je ne regrette pas d’être venu, c’était sensationnel
Mais vous allez me perdre de vue jusqu’au prochain noël !
Assiduité Relative
Musique entre punk et chansons, dans les alentours de Nancy (54).
Pit – Guitare et Chant
Mike – Guitare
Eddy – Basse
Antoine – Batterie
© Tous droits réservés.